Gérard Depardieu : une procédure disciplinaire a bien été ouverte concernant sa Légion d'honneur
Une procédure disciplinaire a bel et bien été engagée le mois dernier par la grande chancellerie de la Légion d’honneur au sujet de la décoration de Gérard Depardieu. La démarche a été lancée après la diffusion début décembre de l’émission « Complément d’enquête » sur France 2 révélant des images tournées il y a cinq ans en Corée du Nord : le monstre sacré du cinéma français y multiplie les blagues graveleuses et les allusions sexuelles, notamment à propos d’une fillette faisant du poney.
« Compte tenu de la nature de ces propos, le grand chancelier a, conformément à l’article R 103 du Code de la Légion d’honneur, averti Monsieur Gérard Depardieu de l’ouverture d’une procédure disciplinaire. Conformément à ce même article, Monsieur Gérard Depardieu peut maintenant produire ses explications et sa défense au moyen d’un mémoire établi par lui-même ou son avocat », indique le directeur de cabinet de l’institution dans un courrier en date du 22 décembre dernier. Cette lettre, dont nous avons pris connaissance, était adressée à l’avocat rémois Emmanuel Ludot qui, au nom de l’association d’aide aux justiciables Robin des lois, dont il est le conseil, avait alerté la grande chancellerie sur le respect de la présomption d’innocence.
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Parmi les innombrables réactions suscitées par le reportage de « Complément d’enquête », celle de la ministre de la Culture Rima Abdul Malak avait été l’une des plus virulentes. Elle avait déploré une attitude « qui fait honte à la France ». « Une Légion d’honneur, cela distingue un homme, un artiste, une attitude, des valeurs. Il se trouve que j’ai échangé avec le grand chancelier de la Légion d’honneur, le général Lecointre : un conseil de l’ordre de la Légion d’honneur va se réunir et va engager une procédure disciplinaire pour décider si cette Légion d’honneur doit être suspendue ou pas, retirée complètement ou pas. Ce sera à eux de décider », avait-elle ajouté le 15 décembre dernier.
La décision pourrait revenir à Emmanuel Macron
Il ne s’agissait en l’espèce pas de paroles en l’air puisque, comme nous le confirme la grande chancellerie ce mardi, la procédure a bien été engagée, vraisemblablement peu de temps après cette déclaration. « La ministre de la Culture a tout loisir d’échanger avec le grand chancelier mais il ne dépend pas de son ministère », précise une source proche du dossier qui rappelle que l’initiative d’engager une procédure relève exclusivement de la vénérable institution.
Le cas Gérard Depardieu avait fait réagir jusqu’à Emmanuel Macron. « La Légion d’honneur est un ordre dont je suis le grand maître, qui n’est pas là pour faire la morale et ce n’est pas sur la base d’un reportage ou de telle ou telle chose qu’on enlève la Légion d’honneur à un artiste », avait cru bon de dire le chef de l’État sur France 5 le 20 décembre en ciblant sa ministre de la Culture, l’accusant de s’être « un peu trop avancée ». Or, il apparaît qu’à cette date la grande chancellerie avait, de son propre chef, très vraisemblablement déjà engagé ses démarches.
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Comme le précise le courrier du 22 décembre envoyé à Me Ludot, conformément aux statuts en vigueur, il appartient désormais au conseil de l’ordre de la Légion d’honneur de se réunir et d’émettre un avis sur les mesures disciplinaires à éventuellement prendre à l’encontre de Gérard Depardieu. Outre le grand chancelier qui le préside, ce conseil de l’ordre, qui fait office de Conseil des Sages, réunit seize membres qualifiés. Le conseil peut émettre un avis de non-lieu. Il peut aussi recommander une censure, c’est-à-dire un blâme, auquel cas la décision reste entre les mains du grand chancelier, le général Lecointre. Mais si le conseil de l’ordre se prononce en faveur d’une suspension ou d’une exclusion, la décision relève uniquement du Grand Maître, le président de la République. Compte tenu de ses déclarations sur le plateau de « C à vous », on imagine mal Emmanuel Macron couper le ruban d’Obélix.
La démarche ne concerne pas la procédure judiciaire en cours
« Le lancement de la procédure disciplinaire n’est pas synonyme de sanction. Il appartient maintenant à Monsieur Gérard Depardieu d’apporter les éléments de contexte indispensables permettant d’appréhender dans quelles conditions ces propos ont été tenus », précise le directeur de cabinet de la grande chancellerie dans le courrier du 22 décembre.
Dans un communiqué diffusé le 16 décembre au lendemain des déclarations de Rima Abdul Malak, les avocats de l’acteur, Mes Béatrice Geissmann Achille et Christian Saint-Palais, avaient fait savoir que leur client mettait sa Légion d’honneur « à la disposition » de la ministre de la Culture. Ils se demandaient par ailleurs si, par ses propos, la ministre ne portait pas « un coup supplémentaire à une présomption d’innocence déjà agonisante ». Sollicités ce mardi, les conseils de l’artiste n’ont pu être joints.
Comme le rappelle l’institution, la démarche engagée ne concerne que les propos rapportés par « Complément d’enquête » et en aucun cas la procédure judiciaire en cours. Depuis 2020, Gérard Depardieu est mis en examen pour viols et agressions sexuelles après la plainte de la comédienne Charlotte Arnould. Des faits qui se seraient produits en 2018 et que l’interprète de « Cyrano de Bergerac » réfute.
Source : Le Parisien