Pesticides: un maraîcher de l'Aisne dépose plainte contre l'Espagne
Un petit producteur de fraises biologiques demande à Bruxelles de saisir la Cour de justice de l'UE. Dans son viseur, les fraisiculteurs espagnols, qui utiliseraient des pesticides interdits par les directives européennes. Explications.
En ce moment, les premières fraises espagnoles font leur apparition sur les étals. Mais il y a une dizaine de jours, Jean-Claude Terlet, un maraîcher français installé à Celles-sur-Aisne, près de Soissons (Aisne), a déposé une plainte contre l'Etat espagnol. Ce producteur de fraises s'estime en effet victime de la concurrence déloyale les fraisiculteurs espagnols, qui utiliseraient à haute dose des pesticides interdits par les directives européennes, dont l'imidaclopride (un néonicotinoïde), l'endosulfan (un insecticide fabriqué en Chine disponible sur le marché noir) et le diméthoate.
Ces produits, hautement cancérigènes et très toxiques pour les abeilles, permettraient aux maraîchers espagnols d'obtenir très rapidement "une forte maturité et une rentabilité qui leur permet d'écraser la concurrence française", est-il écrit dans cette plainte, révélée par RTL, que L'Express a pu consulter. Un "véritable dumping économique", selon l'avocat de Jean-Claude Terlet, Me Emmanuel Ludot, "qui met en difficulté l'activité de mon client, qui produit, lui, des fraises indemnes de tout pesticide".
Des fraises vendues 60 centimes le kilo à Rungis
"A Rungis, les fraises espagnoles sont vendues à des prix anormalement bas -60 centimes d'euros le kilo- quand mon client ne peut descendre, pour sa part, en dessous des 8,50 euros le kilo", nous précise Emmanuel Ludot.
Cette plainte a été soumise à la Commission européenne, qui, avec les Etats membres, est la seule institution à avoir le pouvoir de saisir la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), le "gendarme" des Etats européens.
"Nous demandons la condamnation de l'Espagne, pour sa politique agricole qui officialise l'utilisation de pesticides interdits par les directives communautaires et qui importe en France des fraises contenant ces produits dangereux pour la santé humaine", nous explique l'avocat.
C'est la seule façon d'être entendu
Si Jean-Claude Terlet s'en remet à la Commission européenne, c'est parce que "c'est la seule façon pour les maraîchers d'être entendus, dans la mesure où rien n'est fait pour mettre un terme à ces pratiques", assure son avocat rémois. "En l'état", reconnaît ce dernier, "c'est David contre Goliath. Mais si la Commission s'en empare, alors ce sera le combat de Goliath contre Goliath", résume-t-il.
Emmanuel Ludot, attend désormais les résultats des analyses qu'il a commandées sur les premières fraises espagnoles, afin d'évaluer leur teneur en pesticides. "Ensuite, je ferai désigner un expert par le président du tribunal administratif d'Amiens pour que ces analyses soient confirmées par un expert judiciaire. Puis elles rejoindront la plainte que j'ai déposée à la Commission européenne", conclut-il.
Source : L'express